Il était une fois un pays que tout le monde sous-estimait. En 2001, la Chine entra dans l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) comme on entre dans un buffet à volonté : avec discrétion mais beaucoup d’appétit. On lui ouvrit les portes, on lui présenta la table, et elle s’assit tranquillement… pour finir par manger la part de tout le monde.
L’Occident, ce héros en quête éternelle de sens et de prospérité, croyait alors avoir domestiqué un dragon en lui offrant un siège à la table du commerce mondial. Mais il oublia une chose essentielle : les dragons ne se contentent pas d’obéir aux règles, ils les transforment en flammes.
L’OMC était censée être l’outil ultime du progrès mondial, réduisant les barrières tarifaires pour créer un paradis de libre-échange. Sous le GATT, les droits de douane mondiaux dépassaient joyeusement les 40 %, garantissant une certaine protection pour les industries locales. Mais avec l’OMC, ces droits chutèrent à environ 4-5 %, transformant le commerce international en un Far West où tout le monde pouvait tirer sur tout le monde.
La Chine, armée de son statut de « pays en développement », ne s’est pas contentée de suivre les règles. Elle a parfaitement compris que l’OMC n’était pas une compétition d’équité, mais un jeu où celui qui exploite le mieux les failles gagne. Droits de douane abaissés, accès aux marchés mondiaux, investissements étrangers massifs : le buffet était servi, et Pékin avait apporté des assiettes XXL.
Dès son entrée à l’OMC, la Chine s’est lancée dans une course folle. En 2001, son PIB atteignait 1,33 trillion USD, presque timide. Mais en 2025, il devrait frôler les 19,55 trillions USD, laissant ses voisins européens et américains regarder cette ascension avec un mélange d’émerveillement et d’indignation passive.
Pendant ce temps, l’Union européenne, ce héros tragique qui ne parvient jamais à finir ses phrases, peinait à trouver une réponse. Les États-Unis, quant à eux, oscillaient entre des discours guerriers et des stratégies commerciales qui ressemblaient davantage à un mauvais poker.
L’ironie est savoureuse : l’Occident, chantre de l’industrialisation, a creusé sa propre tombe en externalisant tout ce qui ressemblait à une usine. « Plus de productivité, moins de travail ! », s’exclamaient les économistes enthousiastes, oubliant que ces phrases vieillissent mal quand les machines sont construites en Chine.
En France, la contribution industrielle au PIB passa de 18 % en 2001 à 12,3 % en 2025, tandis que les États-Unis virent leur part tomber de 14 % à 9,6 %. Les usines fermèrent, les savoir-faire disparurent, et on se consola en achetant des smartphones chinois pour moins cher.
Ah, Emmanuel Macron. Défenseur infatigable de « l’Europe qui protège », il martèle que l’unité européenne est la clé pour rivaliser avec la Chine. Mais plus il parle d’Europe, plus le dragon avance. L’Union européenne ressemble de plus en plus à un club de débat où l’on ne parvient pas à se mettre d’accord sur la couleur des rideaux, tandis que la Chine construit des gratte-ciels.
La désunion européenne est fascinante. Les pays membres, coincés entre leurs intérêts nationaux et les promesses d’unité, se battent comme des frères et sœurs pour la télécommande. Résultat ? Une incapacité totale à bâtir une réponse coordonnée face à l’invasion des produits chinois bon marché. Si chaque nation avait agi souverainement, elle aurait peut-être pu ralentir l’essor chinois. Mais non, on a préféré attendre une solution collective, qui n’arrivera probablement jamais.
Puis vient le plan « Made in China 2025 », un chef-d’œuvre d’arrogance industrielle. La Chine ne se contente pas d’être l’usine du monde ; elle veut aussi être son cerveau. L’objectif est clair : atteindre 70 % d’autosuffisance dans les composants stratégiques et dominer des secteurs comme les technologies de l’information, les énergies nouvelles et la robotique.
Pendant que l’Occident organise des conférences sur « comment rester compétitif dans un monde globalisé », Pékin investit massivement et construit l’avenir. Ce plan est une démonstration de puissance et une leçon : le succès ne sourit pas à ceux qui hésitent.
Dans toute grande épopée, il y a un moment de vérité. La Chine n’a pas seulement profité des faiblesses de l’Occident ; elle a planifié son ascension avec une discipline que l’on pourrait presque qualifier de terrifiante. Face à cela, l’Occident continue de s’enliser dans ses contradictions. Le libre-échange ou la protection ? L’unité européenne ou la souveraineté nationale ?
Alors que la Chine impose son rythme, l’Occident semble coincé dans une tragédie shakespearienne où tout le monde parle, mais où personne n’agit. La morale de cette histoire ? Peut-être que pour rivaliser avec un dragon, il faut d’abord arrêter de se comporter comme un troupeau de moutons.