L’élection de Donald Trump en novembre marque le début d’un virage stratégique pour les États-Unis, alors qu’il se prépare à entrer en fonction le 20 janvier. Ses premières déclarations montrent une volonté affirmée de contrer l’expansion économique et géopolitique de la Chine. Dans cette lutte, les routes commerciales mondiales, les pôles et les infrastructures critiques deviennent les terrains d’affrontement majeurs.
Les ambitions de Trump : reconstruire l’hégémonie américaine
Donald Trump cible des territoires stratégiques : le Canada, le Groenland et le Panama. Ces initiatives s’inscrivent dans une vision cohérente visant à réduire l’influence chinoise sur le commerce mondial.
Le Canada est vu par Trump comme une extension naturelle des États-Unis. Sa proposition provocatrice d’annexer le Canada en tant que 51ᵉ État soulève des questions sur la souveraineté et les alliances stratégiques. Cette démarche n’est pas qu’un coup médiatique : elle reflète l’intérêt pour le contrôle des routes maritimes du Nord. Ces routes, qui devraient s’ouvrir vers 2030 grâce à la fonte des glaces, pourraient représenter 15 % du commerce mondial, offrant un raccourci précieux entre l’Asie, l’Europe et l’Amérique du Nord.
Le Groenland, territoire clé contrôlé par le Danemark, est un autre pivot stratégique. Trump y voit un atout majeur pour dominer ces nouvelles routes et accéder aux ressources minérales inexploitées. Sa tentative de rachat du Groenland en 2019, bien qu’avortée, illustre cette ambition.
Enfin, le Panama, passage vital pour 5 % des flux commerciaux mondiaux, symbolise la guerre d’influence entre les grandes puissances. Avec un lac artificiel affaibli par le changement climatique et une capacité de transit en déclin, Trump questionne la neutralité de ce canal et pousse à donner la priorité aux navires américains. Cette pression souligne une volonté de renforcer les positions américaines face à l’expansion chinoise dans les infrastructures portuaires mondiales.
La vision Chinoise : une nouvelle cartographie du Monde
Face à cette offensive, la Chine déploie une stratégie globale fondée sur le concept du « Troisième Pôle ». Cette approche place l’Himalaya comme un pivot équivalent à l’Arctique et à l’Antarctique, mettant en avant son rôle clé dans les équilibres climatiques mondiaux. Ce concept n’est pas qu’une rhétorique : il s’appuie sur des cartes révolutionnaires conçues par Hao Xianguang, où la Chine est placée au centre du monde. Cette représentation sino-centrée matérialise une volonté de remodeler la gouvernance mondiale, en légitimant son rôle dans la gestion des pôles et des routes commerciales.
Les investissements chinois dans les régions polaires sont massifs. En Antarctique, des bases scientifiques comme Kunlun servent à établir une présence permanente, tout en préparant une exploitation future des ressources après 2048, lorsque le Traité de l’Antarctique expirera. En Arctique, la Chine coopère avec la Russie sur les routes du Nord, tout en développant sa propre flotte de brise-glaces, tels que le « Xuelong 2 ». Ces routes polaires, moins contestées et plus courtes, sont perçues comme une alternative stratégique aux passages comme Suez et Panama.
Une guerre commerciale et environnementale
Trump et la Chine s’affrontent aussi sur le terrain commercial. Les États-Unis imposent des tarifs douaniers élevés, visant à ralentir les progrès technologiques chinois dans des secteurs critiques comme l’intelligence artificielle. Parallèlement, la Chine déploie son « soft power climatique » en se positionnant comme leader de la lutte contre le réchauffement. En collaborant avec l’Inde, autre acteur clé du Troisième Pôle, Pékin renforce sa crédibilité sur la scène mondiale.
L’Himalaya, partagé avec l’Inde, illustre cette dynamique. Pékin et New Delhi travaillent ensemble dans des projets scientifiques tout en défendant leurs intérêts respectifs. Pour l’Inde, le Troisième Pôle est une opportunité de s’impliquer dans les affaires polaires, mais aussi un moyen de freiner l’influence chinoise en renforçant sa propre présence arctique.
Les routes polaires et le déclin du Moyen-Orient
Les routes polaires deviennent des artères stratégiques du futur commerce mondial. Avec le réchauffement climatique, ces passages s’ouvrent et permettent de réduire jusqu’à 40 % les distances entre l’Asie et l’Europe. Cependant, ces routes restent réservées aux grandes puissances capables d’investir dans des infrastructures adaptées. La Chine et la Russie dominent déjà cet espace, alors que les États-Unis cherchent à rattraper leur retard.
Parallèlement, la transition énergétique affaiblit l’importance géopolitique du Moyen-Orient. La baisse de la demande en pétrole et l’émergence des véhicules électriques redirigent l’attention vers des zones comme l’Arctique et l’Antarctique, où les ressources stratégiques (minerais, eau douce) deviennent les nouvelles priorités.
Un monde en recomposition
Le face-à-face entre les États-Unis et la Chine dépasse le cadre des échanges commerciaux. Il s’agit d’une lutte pour définir l’ordre mondial. Alors que Trump cherche à maintenir l’hégémonie américaine par des actions directes et provocatrices, la Chine adopte une stratégie plus subtile, combinant investissements, influence culturelle et leadership climatique. Le contrôle des pôles, des routes maritimes et des infrastructures critiques sera déterminant pour établir les gagnants de cette nouvelle ère géopolitique.