Macron, héros en mauvaise foi : l’ombre de Marine le Pen et la clé des gilets jaunes

Dans Politique
septembre 22, 2024

Emmanuel Macron se présente comme un réformateur moderne, un homme de rupture, un leader de la transformation. Depuis son ascension fulgurante, il s’est façonné en héros de la République, surmontant les obstacles pour imposer un nouveau souffle à la France. Pourtant, son parcours n’est pas celui d’un héros en pleine lumière, mais plutôt celui d’un homme en pleine confrontation avec son ombre, cette part de lui-même qu’il refuse d’accepter. Et cette ombre, c’est Marine Le Pen.

L’appel de l’aventure et la création de la persona : campbell et jung

Macron, tel un personnage campbellien, a répondu à l’appel de l’aventure en 2017. Il est apparu comme l’homme providentiel, celui qui viendrait réconcilier une France divisée, dépassant les vieux clivages partisans. Mais dès le début, il a porté un masque, ce que Jung appellerait la Persona — cette façade sociale que l’on présente au monde, souvent éloignée de sa vraie nature. Macron s’est vêtu des habits du réformateur progressiste, du leader dynamique, centré sur l’Europe et l’innovation. Ce masque lui permet de se démarquer des élites classiques, tout en lui donnant une posture morale.

Mais derrière cette Persona, une ombre grandit. L’ombre, selon Jung, est tout ce que nous refoulons, tout ce que nous ne voulons pas admettre de nous-mêmes. Pour Macron, cette ombre est incarnée par Marine Le Pen, tout ce qu’il rejette idéologiquement et politiquement, mais aussi tout ce qu’il redoute en lui-même. Marine Le Pen n’est pas seulement une adversaire politique, elle est le miroir de ce qu’il refuse d’accepter en lui : une France nationaliste, protectionniste, profondément attachée à son entre-soi.

Marine le pen, l’ombre de macron : sartre et la mauvaise foi

Selon Sartre, la mauvaise foi est cette capacité à se mentir à soi-même, à refuser d’assumer sa liberté en se cachant derrière des excuses ou des rôles. Macron, en dénonçant sans cesse l’”extrême droite”, ne fait que projeter sa propre peur. Il voit en Marine Le Pen un danger, non parce qu’elle incarne un mal extérieur, mais parce qu’elle révèle une partie de lui-même qu’il ne peut affronter.

Macron se ment à lui-même en prétendant être le rempart contre le populisme, alors que sa gouvernance centralisée et autoritaire, son usage fréquent du 49.3, montrent qu’il utilise des méthodes similaires à celles qu’il condamne. Il se drape dans la moralité du bien, tandis que Le Pen, son ombre, symbolise ce qu’il fuit : la France réfractaire, celle qui craint le changement et veut se protéger. En dénonçant Le Pen comme une menace, il refuse d’admettre que cette menace vient aussi de lui. Il est en mauvaise foi, car il se voit comme un héros éclairé, mais dans ses actes, il est aussi conservateur et protecteur que celle qu’il combat.

Les gilets jaunes, la clé de l’ombre : Krishnamurti et Nietzsche

Macron a fait face aux gilets jaunes avec incompréhension, les voyant comme une force irrationnelle, une révolte populiste. Mais les gilets jaunes, c’est la France profonde, brute, l’instinct collectif qui se dresse contre l’abstraction intellectuelle des élites. U.G. Krishnamurti, dans La Pensée est votre ennemie, nous dit que la pensée rationnelle et analytique est en réalité une prison. Macron est un président de la pensée, un technocrate, un intellectuel qui veut réformer la société de manière scientifique, presque déshumanisée. Mais les gilets jaunes ne répondent pas à la logique. Ils sont l’expression d’une réalité instinctive, celle que la pensée ne peut comprendre.

Selon Jiddu Krishnamurti, la véritable compréhension ne passe pas par le jugement. Macron voit les gilets jaunes comme une perturbation, mais il ne comprend pas qu’ils sont le symptôme d’une vérité sociale plus profonde, une vérité que Marine Le Pen capte mieux que lui. Tant que Macron continuera à juger les gilets jaunes comme un obstacle irrationnel, il continuera à ignorer la clé de la vraie réforme.

Nietzsche, quant à lui, prône une libération des oppositions morales. Le bien et le mal sont des constructions artificielles. Pour lui, l’individuation de Macron ne pourra jamais advenir tant qu’il continue de voir Marine Le Pen comme l’incarnation du mal. Marine Le Pen n’est pas son opposée, elle est l’autre face de la même pièce, tout comme le musulman qui rejette le blanc facho partage en réalité les mêmes instincts de protection et de rejet de l’autre. Le facho, c’est lui. Le musulman rejette le facho pour ne pas voir que le facho est son propre reflet, tout comme Macron rejette Le Pen pour ne pas voir qu’elle est une partie de lui.

Le héros inachevé et la transformation qui n’aura jamais lieu : Campbell et l’individuation

Dans le schéma narratif de Campbell, le héros, après avoir traversé les épreuves, revient transformé avec un “élixir” pour sa communauté. Mais Macron, après toutes ses crises, n’est pas un héros accompli. Il est piégé dans un processus d’individuation inachevé. Il n’a pas intégré son ombre. Il continue de voir Marine Le Pen comme une ennemie extérieure plutôt que de la comprendre comme une réflexion de lui-même et de la France.

La véritable réforme ne viendra pas tant que Macron n’acceptera pas que ce qu’il voit en Le Pen — le nationalisme, la protection, l’exclusion — est une part de sa propre gouvernance. Tout comme les gilets jaunes, Marine Le Pen est un signal que Macron refuse de lire correctement. Il persiste à opposer le bien et le mal, alors que la solution se trouve au-delà de cette dichotomie morale.

Ce dont la France a besoin, ce n’est pas d’un combat entre le bien et le mal, entre le progressisme et le populisme, mais d’un changement de regard, un regard qui dépasse les catégories morales et accepte que cette division n’est qu’une illusion.

La vraie réforme viendra de l’abandon des illusions

Le parcours de Macron, tel un héros moderne, est marqué par la confrontation avec une ombre qu’il refuse d’intégrer. Marine Le Pen n’est pas simplement son adversaire, elle est le miroir de ses propres peurs et contradictions. Tant qu’il la combattra en tant qu’ennemie extérieure, il continuera à se mentir à lui-même, incapable de réconcilier cette France qu’elle incarne avec celle qu’il prétend représenter.

Les gilets jaunes étaient la clé, car ils étaient l’expression brute d’une France déconnectée de l’intellect, une France que Macron, prisonnier de sa pensée, n’a jamais su comprendre. La véritable réforme, la véritable transformation, adviendra le jour où Macron cessera de voir la France à travers les prismes du bien et du mal, du progressisme et du populisme, et acceptera que Marine Le Pen, tout comme les gilets jaunes, fait partie de l’élixir nécessaire à l’unification de la France.

La France n’a pas besoin de héros dans le sens traditionnel. Elle a besoin d’un leader qui accepte son ombre, qui abandonne la mauvaise foi et voit que Marine Le Pen et les gilets jaunes ne sont pas des menaces, mais des révélations. Le combat intérieur que Macron mène, ce n’est pas contre eux, mais contre lui-même. C’est là que réside la véritable clé de la réforme, et tant qu’il ne la saisira pas, la France continuera de stagner dans un cycle de division, sans espoir de réconciliation réelle.

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